Regardez mes Frères, comme l'âme humaine devient inhumaine lorsqu'on la laisse à ses propres forces, loin de l’Évangile qui la redresse.

Il y a une semaine seulement, une nation entière se voyait réduite à néant, emportant sous la terre des dizaines de milliers de personnes.

Et voilà que le monde, avec ses experts et ses journalistes, quelques jours seulement après ce grand drame, passe déjà à autre chose : A la question des régionales qui arrivent, quand ce n'est pas le salaire de Johnny qui interroge.

C'est donc un miracle, mes frères, que vous soyez là ce soir, pour commémorer un évènement qui ne dura pas plus d'une seconde; le temps de faire glisser un couperet sur une gorge. Et, il y a déjà de cela 217 ans.

Rien que pour cela, mes frères, parce que vous maintenez la courroie de l'histoire tendue dans la mémoire des hommes, l'on devrait vous faire un pont d'or, et vous remercier d'aider la nation à n pas perdre de vue la barbarie dont l'homme set capable au nom d'idées devenues un système clos et tranchant, et bien que Chateaubriant ait pu dire un jour que l'une des grandes misères de l'homme était de n'être pas capable d'être malheureux longtemps.

Permettez moi de croire que vous l’êtes encore et que je suis volontiers avec vous, en songeant à Louis XVI et à son Martyr, signe qu’il y a en vous comme en moi, je l’espère, un cœur humain qui bat.

A ceux qui vous reprochent cette commémoration chargée de prière, dites leur qu’ils ne savent plus ce qu’est un homme, qu’il ne savent plus la dignité auquel il a droit, qu’il soit valet ou Roi.

Dites leur que le sang du Christ a coulé indistinctement sur tous les hommes et que les grands comme les petits intéresse son amour.

Ce soir, contre tous les courants de pensée enfermés sur eux-mêmes, vendus aux idées qui ne devraient jamais prendre le pas sur l’amour fraternel, nous faisons œuvre d’humanité en saluant un enfant de Dieu dont les derniers jour et la mort infamante suffiraient à eux seuls à soulever l’âme humaine et à lui donner le goût du dépassement de soi, sans lequel l’homme reste un être inachevé.

Je veux rappeler ce soir, car c’est le jour, même si vous savez tout cela par cœur, que le Roi Louis XVI a accepté sa mort dans un esprit de foi et de sacrifice.

Il convient d’admirer, oui, c’est le mot juste, il convient d’admirer ces yeux ruisselant de lumière, et ce n’est pas de la poésie, ou de l’arrangement historique, à l’instant même où le secrétaire du conseil exécutif Crowel lit la sentence de condamnation.

Aux mots « subira la peine de mort » un regard céleste, écrit Clairit son valet de chambre, qu’il porta sur tous ceux qui l’environnaient, leur annonça que la mort était sans terreur pour l’innocence.

Pas un mot ne sorti de la bouche du Roi, comme le Christ devant le Sanhédrin.

N’ayons pas peur, mes frères, de cette comparaison.

Osons la même, sans audace, puisque Jésus lui-même a dit un jour : « ce que vous aurez fait au plus petit d’entre les miens, c’est à moi que vous l’aurez fait. »

Et à la prison du Temple, mes frères, il n’y a pas plus petit que le Roi.

Le dernier des geôliers a plus de pouvoir que lui.

Quelles que soient nos idées, revenons y, républicaines, anarchistes ou royalistes, ne laissons pas passer la dignité de cet homme, qui nous apprend ce soir à accueillir la mort, non pas avec résignation, mais avec cette paix intérieure qui signe la présence de Dieu dans l’âme, paix que le monarque maintiendra jusque sur les degrés qui le conduirons à l’échafaud.

Chers frères, vous qui proclamez, du moins la plupart d’entre vous, enfants et serviteur de la filiation royale, je vous en prie, permettez moi de vous le dire ce soir, votre premier devoir est de concevoir la mort et de vous en approcher avec tranquillité d’âme.

Vous ! Vous n’avez pas le droit d’avoir peur.

Souvenez vous de ce mot extraordinaire du Père Lacordaire : « La mort disait il, est le plus beau moment de l’homme. C’est là que se retrouve toutes les vertus qu’il a pratiqué, toute la force et toute la paix dont il a fait provision, tous les souvenirs, toutes les images chéries, les regrets doux, et cette belle perspective de Dieu. »

Mes frères, le Roi savait mourir. Nous, on ne le sait plus.

Tout simplement, parce que la perspective de Dieu et absente de l’horizon de l’homme.

Et c’est vous, vous qui rappelé chaque année le courage d’un homme chrétien, et plus encore sa foi en l’éternité, qui devez révéler aux enfants de France le terme heureux de notre vie ici bas.

Dites moi mes frères, quel est le parti politique qui veut conduire les hommes à bien mourir en songeant à l’éternité.

Ne cherchez pas, aucun !

Eh bien moi, je vous dis encore que là est votre place.

Du côté de l’âme humaine, à qui il faut rappeler par l’exemple et la parole, qu’elle est appelée à vivre un jour avec le Christ, le Roi de l’univers visible et invisible.